L’Europe dépend fortement des avions de chasse américains depuis des décennies. Cette situation s’explique par des choix historiques, industriels et politiques. Après la Seconde Guerre mondiale, les pays européens ont reconstruit leurs forces armées avec l’aide des États-Unis. Le plan Marshall a facilité l’accès à des équipements américains. Les avions comme le F-86 Sabre ont équipé plusieurs armées de l’air en Europe. L’OTAN, créée en 1949, a renforcé cette dynamique. Les États-Unis ont poussé pour une standardisation des matériels. Cela incluait les avions de chasse. Les pays membres ont souvent opté pour des modèles américains. Cela garantissait une compatibilité avec les forces de Washington.
Les industries européennes ont eu du mal à suivre. La guerre avait affaibli leurs capacités. Les États-Unis, eux, avaient une avance technologique. Des avions comme le F-4 Phantom ou le F-16 Falcon sont devenus des références. Les Européens les ont adoptés en grand nombre. La France a résisté davantage. Elle a développé ses propres chasseurs, comme le Mirage. Mais même elle a parfois acheté américain. D’autres pays, comme l’Allemagne ou l’Italie, ont moins investi dans des programmes autonomes. Ils ont préféré importer. Cela coûtait moins cher à court terme. Cela évitait aussi des doublons dans l’Alliance atlantique.
Aujourd’hui, cette dépendance reste visible. Le F-35 Lightning II domine les commandes européennes. Des pays comme le Royaume-Uni, l’Italie ou les Pays-Bas en ont acquis. Ce choix s’explique par ses capacités furtives et ses systèmes avancés. Les États-Unis encouragent son adoption via des partenariats. Les industriels européens participent à sa production. Cela crée des emplois localement. Mais cela lie aussi les armées à Lockheed Martin, son fabricant. Les coûts d’entretien et les mises à jour dépendent des décisions américaines. Les données sensibles passent souvent par des serveurs aux États-Unis. Cela pose des questions de souveraineté.
Des alternatives existent en Europe. Le Rafale français équipe plusieurs forces aériennes. L’Eurofighter Typhoon, conçu par un consortium, est utilisé par l’Allemagne, l’Espagne et d’autres. Ces avions sont performants. Ils répondent aux besoins de défense. Pourtant, leur adoption reste limitée hors de leurs pays d’origine. Les coûts de développement sont élevés. Les budgets militaires européens sont fragmentés. Chaque pays décide seul de ses priorités. Cela complique les projets communs. Le SCAF, un futur avion franco-germano-espagnol, progresse lentement. Les désaccords sur les spécifications et le financement freinent son avancement.
Les États-Unis profitent de cette situation. Leurs avions dominent le marché. Ils offrent des packages complets : formation, maintenance, les avions d’interception armement. Les Européens ont du mal à rivaliser sur ce plan. Acheter américain simplifie la logistique. Cela renforce aussi les liens avec Washington. Mais cela a un prix. Les armées européennes dépendent des cycles de production américains. Si Washington ralentit ou stoppe une livraison, les capacités opérationnelles en souffrent. Les pièces détachées viennent souvent des États-Unis. Les délais peuvent s’allonger en cas de crise. Cette dépendance limite l’autonomie stratégique de l’Europe.
La guerre en Ukraine a mis cette question en lumière. Plusieurs pays ont accéléré leurs achats de F-35. La Pologne, par exemple, a commandé 32 exemplaires en 2020. La menace russe a poussé à des décisions rapides. Les avions américains étaient disponibles immédiatement. Les alternatives européennes demandaient plus de temps. Cela montre une réalité : la réactivité prime parfois sur l’indépendance. Les États-Unis ont su capitaliser là-dessus. Leur industrie aéronautique est rodée pour répondre vite.
Pourtant, certains critiquent cette tendance. Des voix appellent à plus de souveraineté. Elles pointent les risques d’une dépendance prolongée. Si les relations avec Washington se tendent, l’Europe pourrait se retrouver vulnérable. Les sanctions ou les restrictions d’exportation sont des leviers possibles. Les données du F-35, par exemple, sont partiellement contrôlées par les Américains. Cela inquiète des experts en cybersécurité. Ils redoutent une perte de contrôle sur des systèmes clés.
Des efforts émergent pour changer la donne. La coopération industrielle s’intensifie. Le programme Tempest, porté par le Royaume-Uni avec l’Italie et la Suède, vise un nouvel avion de chasse. Le SCAF, malgré ses lenteurs, avance aussi. Ces projets demandent du temps et de l’argent. Ils nécessitent une volonté politique forte. Les Européens doivent aligner leurs priorités. Sans cela, les États-Unis garderont leur avance. Les armées continueront d’acheter américain par commodité.
La dépendance n’est pas totale. L’Europe a des compétences aéronautiques solides. Dassault, Airbus ou BAE Systems produisent des technologies de pointe. Mais ces forces sont dispersées. Les rivalités nationales freinent les synergies. Pendant ce temps, les États-Unis maintiennent leur influence. Leurs avions restent une solution clé en main. Les Européens oscillent entre pragmatisme et ambition. La balance penche encore vers Washington. Cette dynamique pourrait durer des années.
Mois : mai 2025
Deux entreprises pionnières dans les eVTOL
En Chine, les transports aériens connaissent un développement rapide. Depuis avril 2025, deux entreprises ont reçu l’autorisation de déployer des taxis volants autonomes, connus sous le nom de eVTOL. Ces aéronefs, capables de décoller et d’atterrir verticalement, sont entièrement électriques et ne nécessitent aucun pilote. EHang Holdings et Hefei Hey Airlines sont les premières à recevoir cette approbation. L’Administration de l’aviation civile de Chine a validé leurs certificats d’exploitation, permettant à ces drones de transporter des passagers. Les premiers vols ont été lancés fin mars dans des zones sous surveillance. Les itinéraires ont été validés par les autorités locales.
EHang, un leader du secteur, a conçu l’EH216-S, un modèle avec seize hélices capable d’embarquer deux personnes. Avec une vitesse maximale de 100 km/h et une autonomie de 35 km, cet appareil a passé plusieurs tests avant d’être certifié. En 2023, il a reçu son certificat de type, suivi de la certification de navigabilité. En 2024, la production en série a démarré, avec une capacité d’assemblage de 600 unités par an dans une usine située à Yunfu. En 2025, EHang prévoit de livrer 400 appareils. Hefei Hey Airlines, quant à elle, suit une approche similaire et développe ses propres drones autonomes pour le transport urbain.
Le but principal de ces taxis volants est de réduire les embouteillages dans les grandes villes chinoises. En effet, la circulation y est souvent un problème majeur. Les trajets en voiture sont longs et peuvent être stressants. Les eVTOL représentent une alternative rapide, volant à une altitude inférieure à 1 000 mètres. Les coûts de transport sont comparables à ceux des taxis traditionnels. Ce système est accessible à tous, sans besoin de formation spécifique. La réservation se fait simplement via une application mobile, comme pour un taxi ordinaire.
Parallèlement, la Chine investit dans l’économie de basse altitude, notamment à travers les hélicoptères et les drones électriques. En 2024, le marché de ce secteur était estimé à 64 milliards d’euros, avec des prévisions qui indiquent une valeur de 250 milliards d’euros d’ici 2030. Afin de soutenir cette croissance, le gouvernement chinois a mis en place un plan de financement soutenu par 130 milliards d’euros en bons du trésor. Ces fonds sont utilisés pour construire les infrastructures nécessaires, notamment les vertiports dans des villes comme Shenzhen et Canton, qui permettent aux drones de décoller et d’atterrir en toute sécurité.
Un autre acteur majeur, AutoFlight, a réalisé un vol interurbain en février 2024 avec son modèle Prosperity, reliant Shenzhen à Zhuhai en 20 minutes, contre trois heures en voiture. Ce modèle peut transporter jusqu’à cinq passagers et est entièrement électrique et autonome. Heli-Eastern, partenaire d’AutoFlight, a commandé 100 unités pour desservir les hubs régionaux et les ports. La certification pour les vols avec passagers est prévue dans les deux prochaines années.
D’autres sociétés, comme Xpeng via sa filiale AeroHT, testent des modèles comme le X2. Ce eVTOL peut atteindre 130 km/h et dispose d’une autonomie de 25 km. Il a été autorisé par la CAAC en 2023, et sa production en série commencera en 2024. GAC, quant à elle, travaille sur l’AirCar, un modèle qui pourrait parcourir 200 km, et une version de 400 km est également en développement.
La Chine se positionne comme un leader mondial dans ce domaine. Tandis que les États-Unis et l’Europe avancent plus lentement, la Chine a déjà adapté ses réglementations pour favoriser l’émergence de ces technologies. En Amérique, la Federal Aviation Administration exige encore qu’un pilote soit à bord, tandis qu’en Europe, l’Agence européenne de la sécurité aérienne espère certifier ces drones d’ici 2025. En Chine, l’intelligence artificielle joue un rôle crucial dans la sécurité et la navigation des drones, facilitant leur déploiement. De plus, la baisse du coût des drones au cours des dix dernières années rend ces taxis aériens accessibles à un public plus large.
Les taxis volants offrent un potentiel considérable, notamment pour le transport de passagers. Le secteur du tourisme et de la logistique suit également cette tendance. À Shenzhen, des drones sont déjà utilisés pour livrer des repas. À l’avenir, le coût de location d’un hélicoptère les eVTOL pourraient également être utilisés pour transporter des organes médicaux. La Chine prévoit une multiplication des vols de ces drones dans les années à venir. En 2035, le marché des taxis volants pourrait atteindre 190 milliards d’euros. Ce modèle chinois attire déjà l’attention d’autres pays, et la compétition dans ce secteur s’intensifiera rapidement.